jeudi 22 octobre 2009

7 Août


En ce vendredi, la météo annonce grand beau. Le réveil sonne donc à 8h, et nous découvrons avec stupeur que c’est bouché, vraiment bouché, encore pire qu’hier. C’est un peu la désillusion au petit déj’. Malgré tout, il semble que le ciel se dégage par la droite. Pat nous recommande de nous tenir prêts. On commence à le connaître, en général il flaire les bons coups… Sans rechigner on s’exécute. Peu de temps après nous voilà partis. Ber et moi passons récupérer nos skis à l’entretien, et nous rejoignons Pat et Eric qui trépignent d’impatience. Ca y est, il fait grand beau, ça va envoyer !

Nous voilà parti pour Marte, qui nous mènera au sommet de la station. Nous ne sommes pas les premiers, mais presque, du coup on monte tranquillement les 35 minutes de marche à flan de crête qui nous mènent au départ de Cerro Martin. Un run que l’on a déjà fait le deuxième jour, sauf que là, cinquante bons centimètres de peuf se sont déposés sur ses pentes. Deux gars arrivés en même temps que nous nous cassent un peu les lignes, mais c’est pas grave, y’en aura pour tout le monde.



Pat, fidèle à ses habitudes, ouvre la face par un run dont il a le secret. De la neige vole sur plusieurs dizaines de mètres après sont passage, c’est ça qui est bon ! Eric, Bertrand puis moi le suivons sans trop attendre. La face est tombée d’une traite, tant la neige est facile à skier. Tout comme hier on en a jusqu’à mi cuisse, mais aujourd’hui le soleil est bel et bien là et nous colle un gros sourire sous le masque. En une vingtaine de secondes, chacun plie son run. 600m dans les dents.



Sitôt terminé, Pat décide de nous emmener dans son run préféré : Entre Rios. Nous effectuons une longue traversée, parfois à ski quand la neige le permet, parfois à pied, pour nous rendre à l’aplomb de l’itinéraire. L’approche est déjà difficile, ça casse sous le poids du corps et on en a rapidement à mi cuisse. Pas facile d’avancer là dedans. Pat annonce la couleur : ça va être une grosse galère. Tant pis, on a déjà perdu trop de temps pour faire demi tour et partir sur d’autres runs, on y va.





Nous décidons rapidement d’installer des relais, afin que ce ne soit pas toujours le même qui fasse la trace. Après deux lacets pour couper la pente, on décide d’y aller dré dans l’pentu. Nous attaquons donc la première déclivité de la journée avec enthousiasme, nous sommes en pleine forme, la météo est stable, tout va bien. Après plusieurs relais, nous commençons de prendre de l’altitude. Nous sommes obligés de lancer les bâtons devant nous en guise de barre de traction pour nous faciliter la tache tant il y a de la neige et la pente est raide. Un long passage à l’ombre refroidira l’ambiance. Passant la plupart du temps les mains dans la neige, nous nous retrouvons rapidement avec les doigts gelés. Ca devient dur, non pas physiquement, mais mentalement. Le dôme qui nous surplombe semble à une éternité.




Avec un peu de courage, nous parvenons à son sommet. D’après Pat, derrière, sur les crêtes, ça ira mieux, ce sera plus compact. Rien du tout, pas cette fois ci. Du coup, nous grimpons encore un peu, et prenons le temps de nous ravitailler. Ca fait déjà plus de deux heures qu’on marche.
Nous repartons peu de temps après, à flan de crête en visant un pierrier. Une fois arrivé dans ce dernier, ça devient encore plus difficile. Les pierres dévalent la pente sous chaque appui, cette dernière est raide, il faut donc être vigilant malgré le froid et la fatigue mentale qui nous gagnent. Bertrand est devant et fait un peu de terrassement pour sécuriser ses appuis. Une fois cet obstacle traversé, Pat prend les devants. Nous retrouvons une neige dure qui n’est pas pour nous déplaire. En revanche, la pente est raide, et si l’un de nous glisse, on le ramasse plusieurs dizaines de mètres en bas dans le pierrier. Vigilance donc…


Nous contournons le pierrier par dessus, et nous nous retrouvons au pied du dôme sommital. Encore quelques mètres et nous serons arrivés. Eric à le plaisir de poser le pied au sommet en premier. Nous l’imitons sans tarder. Nous venons de vaincre notre premier 4000 m.








A peine après avoir vu le spectacle panoramique que nous offre ce sommet, Bertrand me lâche un sincère « j’ai envie de pleurer putain !!! » Il n’a pas tort, c’est émouvant. On a tellement galérer pour en arriver là que c’est une réelle victoire. Mais la récompense est de taille. Outre la vue époustouflante à 360°, voilà que se déroulent sous nos pieds , 1500m de dénivelés gorgés de peuf et vierges de toute trace. Après 4h30 de marche skis sur le dos, il semble qu’on les ai bien mérité.




Nous nous rééquipons et gagnons le départ un peu plus bas sur la crête. Pat décide de faire deux groupe de deux afin que chacun puisse faire sa ligne dans le haut. Il s’engage, et j’ai à peine le temps de m’approcher du bord qu’il a déjà disparu pour réapparaître quelques secondes plus tard tout en bas du run. Impressionnant.


Eric s’engage, Ber le suit de près. Leur trace rencontrera une petite compression neigeuse qui leur procurera de bonnes sensations. Je ferme la marche en prenant un plaisir immense à rider cette face qui parait sans fin. A mi pente, je rejoint Bertrand, à qui lui aussi ses cuisses ont dit stop. A peine le temps de reprendre notre souffle que nous repartons dans l’étranglement de la face, avant d’ouvrir sur une large pente. Arrivés dedans à pleine vitesse nous taillons des courbes immenses. La neige est exceptionnelle, légère, rapide, ça siffle dans les oreilles. A l’arrivée sur le replat, je me fait surprendre par une neige trafollée. Qu’importe, j’en ris même tant le run a été énorme.


Et voilà que quelques minutes après notre arrivée au sommet, nous nous retrouvons tous les quatre 1500m plus bas, à rire comme des enfants, à regarder nos traces…de descente mais aussi de montée, car dans ces conditions, elles sont tout aussi admirables. Quelques photos et nous voilà repartis direction la terrasse, pour se ruer sur une bière et un burger amplement mérités.

En lisant ces lignes, certains doivent nous prendre pour des fous. Plus de 5 heures de marche dans la journée, pour maximum deux minutes de ride…Peut être que leurs pensées sont justifiées. Néanmoins, après une journée comme celle là, nous apprécions à sa juste valeur le privilège qui nous est offert. Avec du recul, la souffrance dans la neige et le froid devient moment de partage et de convivialité, exploit personnel quelque part également, sentiment du devoir accompli aussi… Et quand on arrive à connaître de tels sentiments au sommet de la montagne, de telles sensations sur la neige, une telle joie au bas de la pente ; on attend qu’une chose : que ça recommence !!! Nous essaierons de nous appliquer à la tâche dès demain.

0 commentaires:

 

blogger templates | Make Money Online